Louis Gaume et la naissance du Pyla : l’homme qui bâtit une légende
Puis un homme est arrivé, marteau en main et rêve en tête : Louis Gaume.
C’est lui qui, au fil du XXᵉ siècle, a donné au Pyla son allure si particulière, entre élégance basco-landaise et douceur gasconne.
Un ouvrier devenu bâtisseur de légendes
L’histoire commence en 1922.
Louis Gaume, compagnon maître-zingueur originaire de l’Allier, vient tout juste d’achever son tour de France.
Il s’installe à Arcachon, travaille un temps pour une entreprise locale de charpenterie, puis… imagine plus grand.
Beaucoup plus grand.
Avec son associé Daniel Meller, il acquiert plus de 140 hectares de terrain entre la forêt et la dune.
Leur intuition ?
Créer un lotissement à l’ombre des pins, où les familles aisées viendraient respirer, loin du tumulte des villes.
Ainsi naît Pyla-sur-Mer, dont les villas semblent posées sur le sable comme des coquillages habités.
Le style Gaume, une grammaire du charme discret
Derrière chaque maison Gaume, on retrouve la même signature, sobre, équilibrée, sans tape-à-l’œil.
Des murs blancs, des colombages sombres, des volets vert pin ou rouge basque, des toits romains à faible pente et des pierres blondes du pays.
Un style immédiatement reconnaissable, qu’on qualifiera plus tard de « basco-landais », mélange de traditions gasconnes et d’accents du Pays basque.
Louis Gaume n’invente pas un style : il le réinvente.
Il en gomme les excès, le rend habitable, intemporel, presque musical.
Son architecture séduit la bourgeoisie bordelaise et parisienne, qui rêve d’un havre chic mais sans ostentation.
Un luxe tranquille, enraciné dans la nature.
L’exotisme selon Gaume
On pourrait croire que le « basco-landais » du Pyla est une fantaisie, une erreur géographique.
Louis Gaume, lui, savait très bien où il construisait : en terre gasconne.
Mais il a choisi d’y injecter une part d’exotisme.
Il savait qu’il fallait faire rêver les visiteurs, ces “estrangeys” en quête d’ailleurs, et que le Pays basque, déjà auréolé de charme faisait vendre.
C’est ainsi qu’il a “basquisé” la pinède, tout en préservant l’âme locale : les avancées de toit (baylet), les poutres apparentes, la chaleur du bois.
Le Pyla devient alors un décor rêvé, où les pins jouent le rôle des colonnes d’un temple moderne ouvert sur l’océan.
Une réaction au mauvais goût
À l’époque, le littoral français est envahi par des constructions « pittoresques » : maisons à tourelles, vérandas italiennes, toits de chaume à la normande.
Une débauche de pastiches.
Louis Gaume prend le contre-pied.
Son style revendique la simplicité comme élégance, la vérité des matériaux comme marque de noblesse.
Chaque maison s’intègre à la dune, épouse la lumière et respire l’air du large.
Le Pyla n’est pas seulement bâti : il est composé, comme une partition.
Le combat d’une lignée
Le style Gaume aurait pu disparaître dans les années 1970.
Un projet touristique pharaonique prévoyait d’élever des pyramides de béton, inspirées de La Grande-Motte, au sud de la Dune du Pilat.
Un descendant de Louis Gaume refusa de voir le rêve familial englouti sous le béton.
Appuyé par le ministre Michel Jobert, il obtint l’abandon du projet.
Ce jour-là, c’est plus qu’un paysage qui fut sauvé.
C’est un certain art de vivre du Pyla : celui d’une architecture enracinée dans la nature, respectueuse du lieu, pensée pour durer.
Héritage et horizon
Aujourd’hui encore, marcher au Pyla, c’est lire dans le bois et la pierre la vision d’un homme qui croyait à la beauté simple.
Les villas Gaume ne cherchent pas à impressionner.
Elles respirent.
Elles s’inscrivent dans un silence rare — celui d’une époque où bâtir, c’était prolonger le paysage, pas le dominer.
Louis Gaume n’a pas seulement construit des maisons.
Il a inventé une harmonie entre l’homme et la dune.
Et c’est sans doute cela, le vrai luxe du Pyla.


